Notions de courbure en géometrie


Nous allons expliquer les deux notions de courbure présentes en géométrie, et nécessaires à la description de notre espace-temps suivant la théorie de la Relativité Générale :

La courbure extrinsèque

Lorsqu'on suit une courbe, sa direction (son vecteur tangent) peut varier. L'angle de déviation de cette direction pour un arc d'une courbe lisse S près d'un point donné P, est généralement proportionnel à sa longueur, soit exactement (dans le cas d'un arc de cercle), soit approximativement (d'autant plus précisément que l'arc est petit). La courbure extrinsèque de S en P se définit comme le rapport de cette déviation (coefficient de proportionalité) :

Limite (pour de petits arcs de S contenant P), de (Angle de déviation (en radians) / Longueur d'arc).

La courbure d'un cercle dans un plan Euclidien, est l'inverse de son rayon.
Dans une sphère, les "lignes droites", courbes de courbure extrinsèque nulle, sont les "grands cercles" de même centre que la sphère.
Sur la Terre assimilée à une sphère, l'équateur et les méridiens sont des droites, mais les parallèles sont courbes.
Nous avons une compréhension intuitive de la courbure d'une courbe dans un plan, en prenant le cas d'une route sur un terrain horizontal, suivie par une voiture: la courbure de la route près de chaque point est «mesuré» par l'orientation du volant nécessaire pour la suivre, et également par la sensation de poussée latérale lorsque la voiture va à une vitesse constante.

Pour un sous-espace S de E de dimension> 1, la courbure extrinsèque de S dans E est la mesure de la façon dont une courbe "droite dans S" est incurvée dans E. Ce n'est généralement pas une simple quantité, mais un objet multidimensionnel, donnant une direction orthogonale (au sous-espace tangent) à S en tant que fonction (quadratique) de la direction de courbe choisie dans S (précisément, si n = dim S et m = dim E alors la courbure extrinsèque a n(n+1)(mn)/2 coordonnées). Mais elle peut se réduire à une quantité unique lorsqu'elle est la même dans toutes les directions.

La courbure de Gauss (intrinsèque)

La courbure de Gauss est la courbure intrinsèque pour le cas particulier d'une surface (espace à 2 dimensions), où il est un champ scalaire.

La courbure de Gauss peut être considérée comme une «densité d'angles", comme suit.

Dans toute surface (espace à 2 dimensions, seulement approximativement euclidienne à petite échelle), la somme des angles (en radians) d'un triangle quelconque, peut être différente de π. Par exemple, sur la Terre, un triangle formé d'une partie de l'équateur et de 2 méridiens, a deux angles droits, et l'angle restant (au pôle) peut avoir n'importe quelle valeur.
Plus généralement, le transport parallèle le long d'une courbe fermée induit une rotation d'angle α, qui dans le cas d'un triangle coïncide avec cette différence d'angles:

α = (∑ angles) − π.

Dans le cas d'une sphère (à deux dimensions) de rayon r dans un espace euclidien à 3 dimensions, cet angle α est proportionnel à l'aire A de la zone entourée, suivant la formule

 α = r-2 A

La courbure de Gauss de cette sphère est le coefficient de proportionnalité  R = r-2. Elle est égale au carré de la courbure extrinsèque (r-1).

Les sphères sont un cas particulier de surface courbe, ayant une courbure de Gauss constante. Dans le cas général, la courbure de Gauss d'une surface est un champ (non constant), et l'angle de rotation α induit par transport parallèle le long d'une courbe fermée, est l'intégrale de ce champ sur la surface entourée.

La courbure de Riemann

La courbure de Riemann est le cas général de courbure intrinsèque, pour les espaces de toute dimension (supérieure à 2). C'est un champ qui n'est pas scalaire, mais multidimensionnel (décrit par plusieurs composants quand un système de coordonnées est donné). Pour un espace à 3 dimensions, la courbure de Riemann autour de chaque point est de dimension 6. Pour un espace à 4 dimensions (comme notre espace-temps), il est de dimension 20.

Il y a différentes façons de décrire ce champ. La façon «mathématique» standard, repose sur les propriétés de l'opérateur de dérivée covariante, qui est décrit les variations de tout champ de vecteurs au voisinage de chaque point.
En général, décrivant métaphoriquement un champ comme quelque chose «mesuré» en chaque point, les variations d'un champ de tout type d'objets (vecteurs ou autre chose), sont décrites par un opérateur linéaire de l'espace des «vecteurs de vitesse" d'une appareil de mesure passant par le point donné, de valeur (dans l'espace vectoriel des valeurs du champ) est la vitesse de variation de la valeur mesurée du champ.

La dérivée covariante d'un champ de vecteurs en chaque point, est l'image «la plus fidèle» de la variation du champ autour de ce point, au sens où elle ne correspond aux dérivées partielles de ce domaine que si on choisit un système de coordonnées qui est spécialement «le moins déformé possible» près de ce point.
Les propriétés de la dérivée covariante, diffèrent de celles des dérivées partielles dans un système de coordonnées fixe, parce que (si la courbure est non nulle), un système de coordonnées ne peut pas être également adapté à tout le voisinage d'un point, de sorte qu'on ne peut pas maintenir un système de coordonnées fixe dans tout le voisinage, qui donne la dérivée covariante directement par les dérivées partielles.
En d'autres termes, les variations mesurées par les dérivées partielles, sont celles venant de la structure affine de l'espace donnée par le système de coordonnées choisi, mais cette structure affine est celle d'une géométrie plane, sans courbure, qui n'est pas celle que l'on veut étudier.

Mais maintenant, nous allons donner une description intuitive de la courbure, en étendant aux dimensions supérieures, l'idée ci-dessus de transport parallèle le long d'une courbe.
Pour chaque petite boucle près d'un point, imaginons-la comme une boucle solide que l'on coupe en un point puis que l'on envoie dans un espace géométrique plat. Les deux extrémités de la coupure, qui avaient coïncidé au départ, sont maintenant décallées.
Pour les faire coïncider à nouveau comme initialement, nous pouvons couper la boucle à un autre endroit, obtenant ainsi 2 morceaux, puis déplacer un morceau par rapport à l'autre.
Ce mouvement qui doit être appliqué à un morceau relativement à l'autre, pour faire s'ajuster les deux extrémités (mais les extrémités du nouveau point de coupe s'écartent), est une rotation (en général, un petit déplacement, qui tourne plus qu'il ne translate, au sens où, si c'est une rotation, son centre se trouve à proximité de la région considérée).
En première approximation (pour une petite boucle), cette rotation (ses coordonnées: direction, petit angle (s) ...), ne dépend pas de l'endroit où cette boucle a été coupée.

Maintenant en guise de boucles, nous prendrons les petits parallélogrammes. L'effet de transport parallèle sur toute une boucle peut être déduite de celle sur des petits parallélogrammes, en prenant une surface délimitée par cette boucle et en divisant cette surface en un grand nombre de petits parallélogrammes (ou triangles, qui comptent comme un demi parallélogramme): la rotation globale par transport parallèle autour de la boucle est obtenue en sommant en quelque sorte (en intégrant) toutes les petites rotations venant des transports parallèles autour de chaque parallélogramme.

La fonction qui à chaque paire de vecteurs associe la (petite) rotation produite par le transport parallèle le long d'un petit parallélogramme de direction donnée par ces vecteurs, est une fonction bilinéaire, antisymétrique de ces vecteurs.

Les petites rotations (valeurs de cette fonction) sont assimilables à des formes bilinéaires antisymétriques, décrites par des matrices antisymétriques.

Pour décrire la courbure de Riemann en coordonnées, prenons un "système de coordonnées cartésiennes" approximatif d'un petit voisinage (dans le cas de la cosmologie, il est «petit» par rapport à l'univers, mais grand par rapport à une galaxie ;-). En fait, nous allons utiliser ces noms de coordonnées comme labels d'axes orthogonaux deux à deux dans ce voisinage. Ensuite, chaque paire d'axes définit une petit parallélogramme dans ce voisinage.
L'espace des formes bilinéaires antisymétriques d'un espace de dimension n, est de dimension n(n-1)/2, correspondant aux paires de coordonnées.

Dans le cas n = 4, comme notre espace-temps de coordonnées (x,y,z,t), on a 6 paires: (x,y), (x,z), (y,z), (x,t), (y,t), (z,t).

En tout, la courbure de Riemann est décrite par un tenseur à 4 indices, formant 2 paires antisymétriques. Dans un système de coordonnées, chaque composant de la courbure de Riemann doit être étiqueté par deux paires de coordonnées:

La courbure de Riemann est antisymétrique par rapport à l'échange de deux directions à l'intérieur de chaque paire, mais est symétrique par rapport à l'échange des deux paires.

Ainsi, la courbure de Riemann autour de chaque point d'un espace à 4 dimensions, dans un système de coordonnées approximativement cartésien autour de ce point, est décrite par une matrice symétrique 6×6 où chaque ligne et chaque colonne correspond à une paire de coxqbfkuixordonnées.

Un cas particulier d'espaces géométriques courbes, est ceux de courbure constante, définis de façon équivalente par


Suite : L'expansion de l'Univers en relativité générale.

Pourquoi 20 dimensions au lieu de 21 ?

Cette matrice est sujette à une relation, ne la laissant varier que dans 20 dimensions au lieu de la dimension 21 de l'espace de toutes matrices symétriques 6 × 6.
(remarque à compléter)

Page d'entrée du site : théorie des ensembles et fondements des mathématiques